Paru le 30 Oct. 2000
ISBN 2-84335-032-8
160 pages
14.94 euros
 
  La Vie en deux
 
   
DU MÊME AUTEUR
AUX ÉDITIONS VERTICALES


Tuez-moi
  Lionel Marek
  La femme qu'il aime va le quitter pour un autre homme. Pour fuir sa douleur, le narrateur passe six jours à Hambourg, dans ce pays dont il apprécie tant la culture et la langue. Un séjour à haut risque aussi, durant lequel il doit se méfier de tout, de ces bons Allemands devenus sages et inoffensifs : il est Juif, hanté par la Shoah et les bourreaux du Troisième Reich et comme fasciné jusqu'au masochisme par ce passé horrifiant dont il entend bien percevoir - en cette fin d'année 1986 - l'écho persistant à travers les rues de Hambourg et chez les habitants, l'Allemagne, finalement inchangée.
Dès le deuxième soir, il fait la connaissance, dans un bar de St Pauli, d’un Allemand de 50 ans, qui n'a vécu la guerre et les bombardements qu'à travers ses yeux d'enfant. Un Allemand plus vrai que nature, tel que seul un Juif peut se le représenter, avec toute la force de la rancune et de la paranoïa.
Une étrange relation se noue entre les deux hommes qui, cinq soirs consécutifs, se rencontrent pour déambuler dans les rues de Hambourg. L'Allemand relate et met en scène, au gré des lieux, son passé familial infesté par la mémoire du nazisme ; des récits noirs et scabreux, comme pour à la fois terroriser et séduire ce Juif mal à l'aise en Allemagne, qui, obstinément, tait ses origines.
Une relation de plus en plus sombre et perverse, semblable à un théâtre d'ombres, au terme de laquelle l'un et l'autre se démasqueront : le Juif, en avouant enfin ses origines ; l'Allemand en allant jusqu'au bout de son attrait amoureux et physique pour cet homme encore jeune (35 ans) ; un désir qui participe bien davantage d'un douloureux et narcissique regret de sa propre jeunesse disparue que d'une réelle homosexualité.

Deux thèmes majeurs parcourent ce roman. D'une part, superposé de façon constante au présent - à la destinée des deux personnages - le retour halluciné et erratique aux franges du passé nazi qui “ reste en travers de la gorge ” aussi bien chez les Allemands que les Juifs (ce qu'en Allemagne on appelle désormais une “ symbiose en négatif ”, et dont parle essentiellement le roman). D'autre part, la douleur du vieillissement, la rage que suscite l'impossibilité de revivre sa jeunesse, autrement que par le souvenir ou le fantasme - ce thème faisant de ce roman également une histoire d'amour, voire de possession. Une histoire de double aussi, où tout fonctionne en miroir : après tout, peut-être que chacun de ces deux personnages n'existe que dans l'imaginaire de l'autre - un imaginaire une fois encore prisonnier du passé et de ses stéréotypes.