Paru le 17 Oct. 2001
ISBN 2-84335-123-5
208 pages
16.50 euros
 
  Fumer de l'argent rend pauvre
 
   
DU MÊME AUTEUR
AUX ÉDITIONS VERTICALES


Demain revient
Chagrin mode d'emploi
  Rémi Malingrëy
  “ Le titre du livre n’est pas un message anti-tabac patronné par la Banque de France, c’était la légende d’un dessin que j’avais fait. Il s’est imposé très vite, donnant la désinvolture de ton que je souhaitais pour ce journal.
Ce sont d’ailleurs toujours les mots qui me viennent en premier. Mon intention est, d’une certaine façon littéraire.
Le dessin arrive ensuite, pour la mise en forme, en même temps qu’il fait partie intégrante de mon vocabulaire.
Cela dit, j’ai toujours tenu des journaux ou des carnets de bord depuis l’âge de 10 ans sur des thèmes aussi différents que les cabanes en bois, la route des vacances ou mes habits.
J’aime les cahiers vierges, les pages blanches, l’odeur de colle et de carton qui évoque les cartables d’écolier. Un beau cahier tout neuf aux pages immaculées me donne irrésistiblement envie d’y dessiner, de le remplir.
Mais cette forme d’écriture/dessin du journal est surtout pour moi la forme la plus naturelle et la plus évidente de m’exprimer. C’est à la fois l’exutoire d’une pensée et le besoin étrange de garder une trace des évènements de mon quotidien.
Je vis, j’écris, je dessine. Tout se mélange sur la même page. C’est aussi simple et facile que ça.

Quand j’ai commencé Chagrin mode d’emploi, je m’étais fixé comme “ mission ” de remplir ce beau-grand-gros cahier à la couverture noire que m’avait offert Lefred Thouron à son retour de New York.
Je m’y suis lancé avec délectation. Retrouvant chaque soir, au moment d’en écrire une nouvelle page, un plaisir sans cesse renouvelé. Mais je savais aussi que le chagrin lié à la mort récente de mon jeune frère allait y trouver sa place. J’attendais. Je n’ai rien sollicité, rien prévu, c’est venu tout seul, d’un trait, très fort.

Avec Fumer de l’argent, dont j’ai enchaîné l’écriture presque tout de suite, je voulais faire quelque chose de très différent. Le titre le dit assez bien je crois. Après Chagrin, je voulais me laisser aller à plus de légèreté. Plus de fiction peut-être. Par exemple ne pas mettre de véritables prénoms, mais des “ il ” ou des “ elle ”. Une très grosse envie d’inconséquence.
Mais un journal intime n’est jamais scénarisé et en décembre 1999 se déclare la leucémie de mon fils Quentin. Terrible nouvelle dont je n’ai pas voulu me servir comme d’une trame dramatique. Bien qu’intime, mon journal n’est pas le compte rendu de ma vie privée.
Et puis cette phrase d’un médecin : “ Les chances sont de notre côté ”. J’ai voulu y croire et durant cette longue et lente période, à aucun moment je n’ai orienté mes pages selon cette attente des résultats d’analyse et autres commentaires des médecins à propos de la maladie de Quentin. “ Les chances sont de notre côté ”. Restons léger.
Écrire alors, comme dessiner, doit se faire dans la spontanéité. Ainsi on est sûr de ne pas se tromper. Le geste est lancé, il faut le réussir.
“ Les chances sont de notre côté ”. Et c’était vrai. La vie reprend son cours. J’en suis le copiste. J’en consigne les faits. J’enlumine la copie..

Cela dit, il est vrai que fumer de l’argent rend pauvre ! ”


Rémi Malingrëy